Dans une interview menée le 3 décembre 2020 par Angelika Hammann, directrice des relations internationales à l'INSA Strasbourg, Marie-Agnès Détourbe, directrice des relations internationales à l'INSA Toulouse et ambassadrice locale ECIU University pour le Groupe, explique les enjeux de la récente appartenance du Groupe INSA à cette alliance européenne prestigieuse.
que signifie ECIU ?
L’alliance ECIU University est une initiative du Consortium européen des universités innovantes (European Consortium of Innovative Universities) fondé en 1997 par dix universités européennes à l’initiative de l’Université de Twente aux Pays-Bas. L’Université ECIU réunit des universités en Europe de taille moyenne avec une offre de formation importante en ingénierie et des liens étroits avec le tissu industriel local.
La majorité des universités membres d’ECIU ont été fondées dans les années 50 et 60 suite au déclin de l’industrie traditionnelle de ces régions. Elles devaient pouvoir s’appuyer sur des nouvelles universités pour développer les activités économiques et afin de former une main-d’œuvre pour l’économie de demain. Par conséquent, tous les établissements d’ECIU sont relativement jeunes, ont l’esprit d’entreprise ; ils sont reconnus en particulier dans le domaine de l’ingénierie.
ECIU compte désormais 12 universités dans 12 pays européens différents et une université extracommunautaire, l’ITESM au Mexique en tant que membre associé. Les membres européens de pleins droits sont :
- l’Université d’Aalborg au Danemark
- l’Université d’Aveiro au Portugal
- l’Université Autonome de Barcelona en Espagne
- l’Université Dublin City en Irlande
- l’Université Technique d’Hambourg en Allemagne
- l’Université Technique Kaunas en Lituanie
- l’Université de Linköping en Suède
- l’Université Technique de Tampere en Finlande
- l’Université de Stavanger en Norvège
- l’Université de Trento en Italie
- l’Université de Twente aux Pays-Bas
- le Groupe INSA en France
Il s’agit de la plus grande université européenne en termes de nombre d’établissements qui en sont membres de pleins droits et du plus ancien réseau parmi les 41 alliances européennes labélisées depuis 2019. Cette alliance réunit 207 000 étudiants, 31.118 enseignants, chercheurs et personnel administratif, 449 groupes de recherche.
Pourquoi le groupe INSA a rejoint ECIU ?
Initialement l’INSA Toulouse a été sollicité en 2019 pour rejoindre cette alliance. Cette dernière était à la recherche d’un partenaire français qui partage son ADN et ses valeurs. En effet, l’éducation inclusive socialement et exigeante académiquement, l’articulation étroite avec la recherche, le soutien de l’innovation sous toutes ses formes et dans les territoires, l’interdisciplinarité, l’audace et la prospective enfin, pour relever les défis du futur, sont des défis et des valeurs que nous partageons avec ECIU.
Le Groupe INSA est fier d’appartenir à l’une des 41 université européennes lauréates qui existent désormais en Europe depuis l’initiative lancée en septembre 2017 par le président de la République française. Cette appartenance donne au Groupe INSA une meilleure visibilité internationale et crée des belles synergies de coopération au sein d’un consortium européen dynamique. Elle permet d’obtenir des financements complémentaires que nous pouvons obtenir dans le cadre d’appels à projets régionaux, nationaux et européens (Erasmus+ 2021-2027, Horizon Europe, programmes d’accompagnement nationaux etc.).
Comment fonctionne ce consortium ?
Le conseil exécutif de cette alliance est constitué des chefs d’établissements ou de leur représentant. Bertrand Raquet, directeur de l’INSA Toulouse, y siège pour le compte du Groupe INSA. Des représentants des étudiants et du monde économique font également partie de ce conseil. En outre, chaque établissement a un ambassadeur local qui fait le lien entre l’équipe projet et les communautés locales. Il s’agit dans leur grande majorité de responsables des relations internationales. En tant que directrice des relations internationales à l’INSA Toulouse, je représente le Groupe INSA dans cette fonction. Au niveau européen, l’alliance est gérée administrativement par une secrétaire générale et un directeur de projet de l’Université de Twente. Le consortium s’est également doté d’un bureau de représentation à Bruxelles.
ECIU University n’envisage pas la délivrance de diplômes européens, mais des réflexions sont en cours pour se doter d’une structure juridique donnant un cadre plus souple pour la mise en place d’actions de formation communes structurées autour de challenges et de micro-certifications. Dans sa déclaration sur les orientations stratégiques – ECIU Vision 2030 – , l’alliance réfléchit à « une entité publique-privée au niveau européen, appartenant aux universités membres de l’ECIU, avec la possibilité de recevoir un financement et des revenus mixtes au niveau européen ».
Des équipes européennes issues de tous les établissements membres sont actuellement mobilisées dans ce projet et participent aux neuf lots de travaux : recherche, développement de l’apprentissage par défis (challenge-based education), création et diffusion de micro-certifications (microcredentials), innovation, mobilités, démarche prospective, dissémination et communication….
Que distingue ECIU des autres universités européennes ?
ECIU University n’est pas focalisée sur la délivrance d’un diplôme européen. Elle se concentre davantage sur la mise en place de briques de formation certifiées qui pourraient être valorisées dans le supplément au diplôme et/ou grâce au passeport de compétences actualisable, des micro-certificats européens.
La colonne vertébrale d’ECIU est l’approche par challenge. Que signifie-ce concept concrètement ?
Ce format d’enseignement avait été lancé avant l’initiative « université européenne » en 2015 par le conseil exécutif d’ECIU. Il s’agit de réunir autour de questions sociétales concrètes des enseignants, des chercheurs, des étudiants, des acteurs de la société civile, de la région, de l’industrie au sein d’équipes interdisciplinaires.
Pour la résolution des challenges, les apprenants peuvent s’appuyer sur des micromodules (briques de formation) offerts dans les universités partenaires. Ces micromodules donnent une grande agilité et flexibilité dans le processus d’apprentissage. Dans une démarche collaborative et interdisciplinaire, les apprenants s’engagent dans la résolution d’un challenge en fonction de leur bagage scientifique. Le consortium cherche d’ailleurs à s’adresser aux apprenants tout au long de la vie, pas uniquement aux étudiants en formation initiale. Un ancrage territorial dans la région et la ville d’accueil incluant des liens étroits avec le tissu économique local et la société civile a pour objectif de raccrocher les régions européennes concernées.
Plus d’informations sur ces challenges sur le site internet d’ECIU.
Y-a-t-il un thème fédérateur ?
Un thème fédérateur de toutes les activités développées constitue l’objectif de développement durable des Nations Unis n° 11 (« Faire en sorte que les villes et les établissements humains soient ouverts à tous, sûrs, résilients et durables ») qui a été décliné en sous-thématiques. C’est le ciment de l’Université ECIU sur le plan de la recherche, de la formation et de l’innovation.
Pourriez-vous citer quelques projets actuellement développés au sein d’ECIU ?
Au mois d’août 2020, ECIU University a été lauréate de l’appel à projet SwafS (Science with and for Society) dans le cadre du programme de recherche Horizon 2020. Le projet SMART-ER bénéficiera de deux millions d’euros pour développer un Institut virtuel de recherche visant à développer et à renforcer les liens scientifiques entre les chercheurs et enseignants-chercheurs des 12 universités.
Quelles sont les ambitions d’ECIU ?
Dans sa déclaration sur les orientations stratégiques à l’horizon 2030 ECIU University affiche une « vision ambitieuse de l’avenir à long terme avec des choix stratégiques et des mesures concrètes considérant l’initiative des universités européennes comme une opportunité historique. La construction d’une université européenne est un changement fondamental, un processus à long terme, et non un projet à court terme » .